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Al-Quaida * de Pauline Garaude (2010)

29.11
2010

« Dès ses débuts, al-Qaida se distingue des autres groupes islamistes par sa position violente et pro-terroriste affichée. Dans l’un de ses écrits intitulé Déclaration de Djihad contre les tyrans du pays, Ben Laden formule son positionnement en ces termes : « Les gouvernements islamiques n’ont jamais été et ne seront jamais établis par des solutions pacifiques et des conseils de coopération. Ils seront établis, comme ils l’ont toujours été, par la langue et par les dents. »"(p. 14)

Quand est né le mouvement Al-Qaida ? Comment est-il financé ? Qui est Ben Laden ? Où se cache-t-il ? Quels sont les actes terroristes perpétués par le plus important réseau terroriste mondial ? Sont-ils approuvés par tous les islamistes ? Quel est l’objectif du djihad, de cette « guerre sainte » ? Al-Qaida enrôle-t-elle des femmes martyres ? Est-elle sur le déclin ? L’ »AfPak » est-il toujours le sanctuaire et foyer d’Al-Qaida ?

Journaliste indépendante, correspondante au Pakistan, Pauline Garaude répond avec clarté et concision à toutes ces questions, et aborde même la fameuse théorie du complot. Nonobstant, elle ne va jamais au-delà de toutes ces données factuelles, restant parfaitement objective, si ce n’est en affirmant que le mouvement d’Al-Qaida est devenu une idéologie et qu’il peut survivre à la disparition de son leader, Ben Laden…

GARAUDE, Pauline. – Al-Qaida. – Larousse, 2010. – 287 p. ; 18 cm. – (Mystères). – ISBN 978-2-03-584828-4 : 12 €.

Service de presse

Travelling Square District * de Greg Shaw (2010)

27.10
2010

Un terroriste engage un tueur à gages pour assassiner sa femme infidèle, laquelle l’a précisément dénoncé à la police, d’où la mise sur écoute de son mari…

Toute la bande dessinée repose sur un jeu graphique d’une série de travellings sur la première de couverture, copie personnalisée et déformée de Manhattan et de la statue de la liberté. Le lecteur se fait voyeur, aidé du mouvement d’une paire de jumelles, comme dans Fenêtre sur cour. Une idée originale.

Sarbacane, 2010. – n.p. ; 26*26 cm. – ISBN 978-2-84865-357-0 : 23 euros.
Prêté par des collègues.

A quoi rêvent les loups de Yasmina Khadra (1999)

11.09
2010

« – Lève-toi, c’est un ordre.
– Je ne peux pas, je te dis.
Je braquai mon pistolet sur lui e
t je l’abattis.

Nous nous engouffrâmes dans les forêts, marchâmes une partie de la nuit et observâmes une halte dans le lit d’une rivière. Et là, en écoutant le taillis frémir au cliquetis de nos lames, je m’étais demandé à quoi rêvaient les loups, au fond de leur tanière, lorsque, entre deux grondements repus, leur langue frétille dans le sang frais de leur proie accrochée à leur gueule nauséabonde comme s’accrochait, à nos basques, le fantôme de nos victimes. » (p. 264)

 

A Alger, en cette fin des années 1980, Nafa Walid est engagé comme chauffeur au service de la famille richissime des Raja. Pas pour longtemps : dès que son collègue lui demande de l’aider à se débarrasser d’un cadavre que Junior, son patron, laisse derrière lui, il démissionne, révolté et écœuré. Lui qui rêvait de devenir une star du grand écran finit par se faire escroquer par un ancien acteur, qui lui promet de quitter ce pays, qui prend un visage austère et inquiétant avec la montée de l’intégrisme, pour partir en France faire du cinéma. Sans argent, sans travail, il trouve dans ses prières à la mosquée un peu de sérénité. Un jour, l’imam lui propose de faire le taxi et de donner sa recette pour la cause du FIS, en lui reversant un salaire correct. Nafa accepte…

 

Dès son chapitre d’ouverture, ce roman frappe très dur : ici nulle tendresse, nulle compassion. Dès les premières lignes, le narrateur vient d’égorger un bébé devant sa mère. Quoi de plus inhumain ? Les policiers ont encerclé l’immeuble où ses comparses et lui se sont réfugiés. Ils sont tous morts. On devine sa fin imminente. Comment en est-il arrivé là ?

C’est l’histoire de Nafa Walid que raconte ensuite Yasmina Khadra, ce jeune homme comme tant d’autres qui va finir par se faire enrôler par les islamistes radicaux. Il nous fait vivre le « printemps d’Alger », le refus par l’armée de la victoire du Front islamique du salut (FIS) aux élections législatives de 1991 et la guerre civile entre deux forces qui se déchirent avec l’armée d’un côté et les islamistes radicaux de l’autre.

Parfois les caractères sont tellement tranchés que l’auteur semble avoir un peu forcé le trait, mais le message est on ne peut plus clair. C’est bien d’un roman d’apprentissage qu’il s’agit ici, mais d’un apprentissage vers une véritable descente aux enfers, où la notion de bien et de mal disparait, où l’individu se dissout pour une cause dont il ne peut discuter les ordres.

Une mise en garde imparable.

 

KHADRA, Yasmina . – A quoi rêvent les loups. – Pocket, 2009 . – 274 p.. – (10979). – ISBN 978-2-266-20086-8 : 6,50 euros.

Acheté en septembre à la librairie Chantelivre d’Orléans.

A lire aussi de lui Les hirondelles de Kaboul ***


Extrêmement fort et incroyablement près *** de Jonathan Safran Foer (Etats-Unis, 2005)

03.03
2007

Cette veille du 11 septembre 2001, Oskar, âgé de 9 ans, ne le sait pas, pour lui, cette soirée ressemble à toutes les autres, mais c’est pourtant la dernière où il entendra son père lui raconter une histoire, la dernière où il verra son père. Un an après, Oskar trouve une clé dans une enveloppe où est griffonné le nom « Black », cette dernière elle-même cachée au fond d’un vase. Comme pour les derniers messages laissés sur le répondeur par son père, ce terrible matin, il décide de garder cette découverte pour lui, de n’en parler ni à sa mère, qui ne semble pas beaucoup pleurer son père puisqu’elle s’apprête déjà à le remplacer, ni à sa grand-mère qu’il adore, dont on apprend en filigrane son amour post-traumatique avec le petit-ami d’Ana, sa soeur, morte pendant les bombardements de Dresde. Il part donc, seul mais plein de ressources, frapper à la porte de tous les Black de New-York pour savoir quelle serrure cette clé ouvre et ce qu’elle lui permettra de découvrir sur son père…

Pouvoir faire son deuil, lorsqu’un parent a disparu dans des bombardements,  lorsqu’il n’y a pas eu d’enterrement, c’est difficile, voire impossible. C’est toute l’histoire de ce livre, ressentie sur deux modes différents : alors que le parcours plein d’originalité de ce petit garçon peu commun, jalonné de rencontres diverses et souvent enrichissantes, est essentiellement dialogué et illustré, son grand-père, au contraire, s’est tu, comme mort de l’intérieur, et ne s’exprime plus que par écrit, une main tatouée pour oui, une autre pour non, et un cahier qu’il feuillette pour indiquer sans cesse « je suis désolé ».

Pour décrire cet après-11 septembre, Jonathan Safran Foer a fait le choix d’un roman d’apprentissage, celui d’un enfant, un peu trop éveillé et intelligent peut-être, un surdoué, mais dont les points d’interrogations, les déductions et les trouvailles ingénieuses nous font sourire et nous aident à mieux digérer les épisodes tragiques narrés et les souffrances psychologiques endurées par chacun des personnages, même ceux rencontrés :

« Et si l’eau de la douche était traitée avec un produit chimique qui réagirait à une combinaison de choses, les battements du coeur, la température du corps, les ondes du cerveau, de manière à ce que la couleur de la peau change avec les humeurs ? Quand on serait extrêmement excité, la peau deviendrait verte, et si on était en colère, on deviendrait rouge, évidemment, d’une humeur de mer de Chine on virerait au marron, et quand on aurait le blues on deviendrait bleu.
Tout le monde saurait comment tout le monde se sent et on pourrait être plus attentionné les uns envers les autres. Parce qu’on ne voudrait jamais dire à une personne dont la peau serait violette qu’on lui en veut d’arriver en retard, exactement comme en rencontrant quelqu’un de rose on aurait envie de lui taper dans le dos en disant, « Félicitations ! ».
Une autre raison pour laquelle ce serait une bonne invention, c’est toutes les fois où on sait qu’on ressent très fort quelque chose mais on ne sait pas quoi (…)
«  (p. 211). (n. perso : une invention qui peut aussi se révéler ou pratique ou gênante, pour quelqu’un d’amoureux !).

Illustrations, mots et phrases cerclés de rouge, gribouillis, l’aspect purement formel du roman pourrait paraître original, mais a déjà été testé (La Maison des feuilles, autre roman américain, en avait tiré le maximum) ; de même qu’avait déjà été fait le choix de ce jeune narrateur au regard « naïf » et déformant de la réalité pour apporter une candeur rafraîchissante à un événement à forte résonnance dramatique ; le dénouement, enfin, avec la grand-mère me laisse à demi satisfaite.

Ce n’est donc pas pour son originalité que ce roman m’a plu, mais parce que cette lecture fut un régal à tout point de vue, m’offrant une véritable palette d’émotions toutes plus diverses les unes que les autres. Ce second roman de ce jeune auteur américain fait partie de ce qui nous arrive de meilleur parmi tout ce qui s’écrit actuellement aux Etats-Unis. Un auteur à suivre. D’ailleurs, du coup, il faudra que je lise son premier…

Traduit de l’anglais (Etats-Unis) par Jacqueline Huet et Jean-Pierre Carasso

Edition de l’Olivier, 2006 . – 424 p. :ill. en coul.. – ISBN : 2-87929-481-9 : 22 €.
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