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L’homme irrationnel de Woody Allen (2015)

25.10
2015

Professeur de philosophie muté dans une nouvelle université, Abe Lucas sort sa fiole d’alcool à tout bout de champ, entre deux cours, complètement dépressif. A quoi bon ? Dit-il. A quoi bon ce métier, à quoi bon vivre ? Précédé de sa réputation de coureur de jupons charismatique, il a déjà la coeur de sa collègue Rita, brune quinquagénaire prête à quitter son mari pour partir avec lui en Espagne, et d’une de ses étudiantes, la belle et intelligente Jill, qui a déjà un petit ami. Pourtant, Abe rejette l’une et l’autre, dégoûté de la vie et de l’amour sexuel. Jusqu’au jour où, dans une cafétéria, Jill et lui surprennent la conversation d’une mère éplorée souhaitant ardemment la mort du juge qui va lui ôter la garde de ses enfants…

A la suite de Match Point, qui s’inspirait quelque peu de L’Inconnu du Nord-Express en concentrant en son protagoniste les deux personnages principaux du film d’Hitchcock, le joueur de tennis célèbre parvenu grâce à un mariage d’intérêt et le bourgeois meurtrier, le concept de L’Homme irrationnel repose entièrement cette fois sur la thèse du crime parfait développé dans le film noir d’Hitchcock, en excluant tout mobile possible. Woody Allen marque d’ailleurs bien sa référence puisque la banquette du diner fait songer à celle du wagon restaurant du train, et puisque Abe répète sans cesse qu’il s’agit d’une prouesse artistique, qu’il jubile en opérant ce crime parfait. Il ne fait ensuite en amont et en aval que développer les mécanismes psychologiques des personnages qui l’entourent… et sa théorie de l’absurdité du destin qui tient souvent aux hasards de la vie, déjà bien démontrée dans Match Point. Cela reste somme toute un agréable moment à passer…


L’Inconnu du Nord Express : Bande Annonce VOST par Filmsactu

Evaluer un scénario d’Yves Lavandier

15.12
2014

 

cop. Le clown et l'enfant

cop. Le clown et l’enfant

Après avoir démonté une petite dizaine d’idées fausses (« le cinéma est avant tout un art de l’image », « La mise en scène en dit plus que le scénario. », « Le dialogue doit être réduit au strict minimum. »), Yves Lavandier met en garde les futurs lecteurs de scénarios : à la première lecture, il faut noter les émotions ressenties, et seulement après, en deuxième lecture, proposer une analyse en établissant des diagnostics généraux, liés au sens, au conflit et aux obstacles, à l’unité, au protagoniste, à la caractérisation, à la structure, à la préparation, à l’ironie dramatique ou encore à l’activité, aux dialogues et aux effets. Et surtout, surtout, toujours considérer le scénario comme un travail en cours, ne pas le comparer à un film, à une œuvre achevée. Au final, il faut d’abord utiliser le « je » et pas le « on » car notre avis n’est pas celui de l’humanité, ensuite dire ce qui plaît dans le travail de l’auteur, ce que beaucoup ont tendance à oublier,  car « si les commentaires critiques ouvrent des pistes de réécriture, les commentaires positifs fournissent l’énergie nécessaire à cette réécriture » !

La meilleure formation à la lecture de scénario, conclut Yves Lavandier, ce n’est pas de se contenter de ce livre, c’est encore de participer à un atelier d’écriture. Bien vu !

 

Philomena

11.02
2014

PhilomenaLong-métrage écrit par Steve Coogan & Jeff Pope

Le film est adapté de l’histoire vraie de Philomena Lee, rapportée par le journaliste britannique Martin Sixsmith.

Le pitch

Un grand journaliste aide à contre-coeur une vieille Irlandaise à retrouver son fils, qu’on lui avait retiré au couvent il y a de cela près de 50 ans, alors qu’elle était fille-mère, pour le confier à un couple plus fortuné.

Le synopsis court

Lorsque le journaliste de la BBC Martin Sixsmith tombe en disgrâce, il ne sait plus quoi faire. Quand il parle d’écrire son grand ouvrage sur l’histoire de la Russie, on sourit d’ennui. C’est alors qu’une extra, lors d’une réception, lui parle de sa mère, Philomena, une Irlandaise ayant accouché adolescente dans un couvent catholique, et n’ayant aucune nouvelle de son fils depuis près de 50 ans, adopté contre son gré. Martin commence par refuser : il ne fait pas dans l’aventure humaine. Mais les circonstances l’y contraignent. Martin se charge alors de la quête de Philomena, qui les amènent tous deux aux Etats-Unis, et à se découvrir l’un l’autre, chacun avec ses croyances et son but personnel à atteindre.

Ma critique

On pourrait rapprocher ce thème de celui de The Magdalene Sisters, qui traitait aussi du sort des jeunes filles « perdues » placées dans des couvents en Irlande au XXesiècle, et d’ailleurs évoqué pendant le film par Martin Sixsmith. Mais, finalement, l’enjeu de l’histoire ne réside pas seulement dans cette dénonciation d’un extrêmisme religieux reniant presque la qualité d’être humain libre et aimant, à ces pauvres filles-mères qui sont plus pauvres et isolées que vicieuses et pécheresses. – La scène pleine de suspens du départ du fils alors que la mère n’en est même pas informée, est particulièrement révoltante. – Il réside peu dans les flash-back sur le fils menant sa propre vie sans sa vraie mère, ni dans la quête proprement dite, vite évacuée. Elle réside surtout dans l’interprétation que le spectateur peut faire du duo formé par cette vieille dame de la classe populaire, qui arrive encore à pardonner à celle(s) qui lui a (ont) gâché une partie de sa vie de mère, et qui nous est en cela assez agaçante de conviction religieuse intégrée, et par ce journaliste habitué au luxe, condescendant à faire de l’aventure humaine pour pouvoir remonter sur la scène publique. Rien n’est vraiment dit, mais tout geste qui paraît humain de la part du journaliste n’est en réalité que guidé par son intérêt personnel… Un traité de manipulation finalement…

 

La bande dessinée du scénario à la publication

17.01
2014

 

cop. Caster doc

cop. Caster doc

Après avoir dressé l’historique de la bande dessinée, Jean-Benoît Durand nous fait découvrir, étape par étape, la réalisation d’une bande dessinée : comment écrire un scénario, faire un découpage écrit ou dessiné, trouver le bon agencement des cases, les plans pertinents, les cadres cohérents, gérer les ellipses, créer le mouvement, imaginer les personnages, chercher de la documentation, choisir ses outils de travail, réaliser des crayonnés puis l’encrage, mettre en couleur.

Très pratique, ce documentaire à l’esthétisme soigné, dont la première version date de 1998 sous un autre titre, nous fait découvrir les concepts et les problématiques soulevés par le 9e art, qu’on ne perçoit en général que de l’autre côté de la lorgnette ! Un ouvrage de référence pour tous les néophytes, voire les amateurs avertis.

DURAND, Jean-Benoît. – La bande dessinée : du scénario à la publication. – Castor Doc, 2014. – 127 p. : ill. en coul. ; 18 cm. – EAN13 9782081308398 : 8,60 €.

Reçu en service de presse.

Blue Jasmine de Woody Allen

08.10
2013

Scénario : 

Date de sortie en salle : 2013

Genre : Comédie dramatique

Synopsis 

La vie d’une femme mondaine de la 5e avenue bascule le jour où son richissime mari veut la quitter : Jasmine arrive dans l’appartement de sa soeur adoptive à San Francisco, laquelle lui propose son aide pour surmonter sa dépression et son nouveau départ dans la vie.   

Critique

Woody Allen ne s’est lancé dans rien de bien original : la vie d’une jeune femme bascule le jour où ….. et elle se retrouve démunie, obligée de repartir à 0.

Mais là où il est fort, c’est dans le portrait psychologique qu’il fait de cette femme, et dans la structure de son scénario, dont le dénouement explique quelque peu à quel point cette femme a provoqué elle-même sa chute, alors qu’elle avait toujours opté pour l’inertie.

Woody Allen choisit d’entrelacer la vie passée de Jasmine, baignant dans le luxe, et celle, présente, où elle touche le fond, obligée de côtoyer les gens du commun, les « loosers », qu’elle méprise le plus. C’est un choix d’autant plus judicieux que l’on découvre peu à peu les raisons de sa disgrâce. En contrepoint, il dépeint la vie de sa soeur, son opposé, finalement, mais ce n’est là qu’une intrigue secondaire : d’ailleurs, tout comme sa soeur, elle ne changera pas d’un iota sa personnalité.

Le spectateur oscille donc entre sa vie passée, mondaine et fastueuse, et celle actuelle, où elle a tout perdu, même peut-être la raison.

Le monde passé de Jasmine n’est qu’apparences trompeuses, malhonnêteté, infidélités conjugales et amitiés hypocrites. Il a éclaté, et personne ne lui tend la main, si ce n’est sa soeur, tout comme elle-même n’a jamais tendu la main à personne. D’ailleurs elle ne vient pas voir le fils de son mari par empathie, mais parce qu’elle dit avoir besoin de lui.

Dans le monde présent, Jasmine est devenue alcoolique ; dépressive, sensible à chaque émotion, elle prend sans cesse du Xanax et autres médicaments, elle monologue dans l’avion, dans la rue, partout. On devine sans mal le choc psychologique que cela doit être pour elle : de princesse de la 5e avenue, elle se retrouve draguée par des hommes communs (mécanicien, dentiste) qu’elle méprise, doit suivre des cours d’informatique auxquels elle ne comprend rien et des cours de décoration intérieure par internet, tout en subvenant à ses besoins en devenant la secrétaire d’un dentiste entreprenant.

Or, pour s’en sortir, ayant quitté trop tôt ses études pour devenir « la femme de » et passé son temps à organiser des réceptions et des bals de charité, elle ne trouve finalement, après avoir tenté de se reconvertir tout en gagnant sa vie, qu’une issue : redevenir « la femme de » : elle donne encore en effet l’apparence trompeuse de femme parfaite d’un futur député… Elle se réinvente alors une vie, une personnalité, la femme qu’elle aimerait être. comme chacun de nous a peut-être, sans être fou, été tenté de le faire un jour, du moins en embellissant une parcelle de sa vie. Mais son destin va croiser l’un des personnages qui, sans le savoir, va se venger et empêcher sa vie, tout comme elle l’avait fait avec lui, de prendre un nouveau et meilleur tournant…

Au final, Woody Allen brosse le portrait d’une femme antipathique, égocentrique, qui ne remet à aucun moment en question ses critères de qualité de vie.

House of Cards

10.09
2013

Aux lendemains d’élections présidentielles aux Etats-Unis, un politicien chevronné, Francis Underwwod (Kevin Spacey) qui a contribué à faire gagner le nouveau Président, apprend de la bouche du bras droit de ce dernier, à qui il a également permis d’entrer dans ces fonctions, que finalement il n’obtiendrait pas le poste de secrétaire général qu’on lui avait promis, car il leur serait plus utile en restant au Congrès. Loin de s’avouer vaincu, Francis Underwood imagine une stratégie de chaises musicales qui lui permettrait de briguer un poste non moins prestigieux à coups de manoeuvres cyniques et de manipulations politiques et médiatiques… Jusqu’où est-il prêt à aller ?

Pour cette quête, David Fincher lui a imaginé quatre adjuvants : sa femme Claire (Robin Wright), à la tête d’une entreprise caritative, une jeune journaliste stagiaire ambitieuse, Zoe Barnes, son collaborateur, Doug Stamper, et le parlementaire divorcé alcoolique et cocaïnomane, Patrick Russo. Ses opposants : tous ceux qui se dresseront sur son échiquier politique, au fil des épisodes.

Un thriller politique admirablement mis en scène, qui abat certes déjà ses cartes au bout des trois premiers épisodes. Le personnage principal gagne ensuite en noirceur et machiavélisme, tandis que d’autres personnages se remettent en question…

Les deux premiers épisodes ont été réalisés par David Fincher et écrits par Beau Willimon, à partir d’une mini-série anglaise diffusée en 1990.

Ecrire un scénario de Franck Haro

04.07
2013
cop. Eyrollles

cop. Eyrollles

Après l’excellent outil confectionné par Jean-Marie Roth, je me suis penchée sur celui de Franck Haro. S’ils semblent en désaccord sur la longueur du pitchune phrase simple et courte qui résume l’idée maîtresse du film -, du synopsisentre 4 lignes et une page et demie maximum - et du traitementdocument d’une vingtaine de pages voire plus, où l’histoire est développée dans son intégralité. Pas de dialogues ni de description, mais tous les personnages, les intrigues secondaires, les décors, les rebondissements -, ils se retrouvent sur les techniques dramaturgiques mises en place dans un scénario. Franck Haro insiste dès le début sur le produit fini, c’est-à-dire celui qu’on adresse au producteur. Ainsi, à l’intérieur du dossier paginé, sur la couverture duquel figurent les coordonnées de l’auteur et le titre en mentionnant « titre provisoire » dessous, on trouve le pitch, le synopsis, le traitement, la note d’intention, la continuité dialoguée et le CV du scénariste.

Un bon guide pour les grands débutants.