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Manuel d’autodéfense intellectuelle de Sophie Mazet

23.07
2017
cop. Robert Laffont

cop. Robert Laffont

Jeune enseignante, Sophie Mazet remarque que ses lycéens ne manquent pas d’esprit critique envers les autres et l’enseignement, mais n’en font pas preuve lorsqu’il s’agit de s’informer correctement. S’inspirant alors de la déclaration du célèbre linguiste Noam Chomsky, selon lequel un « cours d’autodéfense intellectuelle devrait être obligatoire dans tout système d’éducation qui se respecte », elle leur propose alors un cours d’autodéfense intellectuelle contre toutes les formes d’endoctrinement, qui aboutira à une émission sur France Inter puis à cette sorte de manuel.

Voici les intitulés des neuf grands chapitres qui composent cet ouvrage :

            • Qu’est-ce que l’information ?
            • La vie est-elle plus belle dans les séries TV ?
            • « On nous cache tout, on nous dit rien » ou la dangereuse percée de la pensée complotiste.
            • A quoi sert la laïcité ?
            • Santé, nutrition, environnement : le pire est-il toujours certain ?
            • Peut-on échapper à la publicité ?
            • En politique, faut-il toujours se méfier des mots ?
            • Tous les discours dits « scientifiques » sont-ils fiables ?
            • Le pire ennemi, c’est nous !

Faisant un tour d’horizon des différentes sources d’informations, médiatiques, scientifiques, publicitaires, politiques, et même les séries qui nous inculquent un certain nombre de préjugés et de fantasmes sur des secteurs professionnels, Sophie Mazet tente, à travers cet ouvrage, de pallier à l’insuffisance de l’éducation des jeunes générations, voire de ses concitoyens, pour s’armer contre la désinformation.

C’est là l’une des missions essentielles d’un acteur injustement placardisé dans l’Éducation nationale, le professeur documentaliste, chargé de former tous les élèves à la recherche et à l’évaluation de l’information dans tous les domaines. Hélas, sans classe attitrée, sans horaire dédié, il n’a pas les moyens de remplir cette mission, renvoyé trop souvent à la simple gestion de son centre de ressources, sa boîte à outils pour forger cet esprit critique qui forme le citoyen éclairé. Je n’y ai donc rien appris, en revanche il est toujours bon de consolider et de réactiver ses acquis.

Synthétique, bien documenté et plein d’humour, cet ouvrage gagnerait donc à être lu par tous, autant par les parents, grands-parents et enseignants, que par les lycéens et étudiants. A lire sans tarder !

Gone Girl (2014)

29.10
2014

Fiche descriptive

Titre original : Gone Girl
Titre québécois : Les Apparences
Genre : thriller
Scénario : Gillian Flynn, d’après son roman Les Apparences (Gone Girl)
Réalisation : David Fincher
Montage : Kirk Baxter
Musique : Trent Reznor et Atticus Ross
Production : Leslie Dixon, Bruna Papandrea et Reese Witherspoon
Sociétés de production : Pacific Standard et New Regency Pictures
Durée : 149 minutes
Dates de sortie : octobre 2014

Synopsis court

Le jour de leur cinquième anniversaire de mariage, Amy disparaît mystérieusement. Nick prévient aussitôt la police  : la table en verre du salon brisée et des taches de sang semblent indiquer qu’elle a été enlevée ou tuée.

Très vite, les soupçons se portent contre Nick, qui ne semble pas du tout jouer le rôle du mari éploré attendu devant les médias, ses beaux-parents ou la police. Il continue même à tromper sa femme avec une jeune étudiante pulpeuse, Andie, en cachette de sa soeur, chez qui il s’est réfugié, le temps que la police scientifique passe la maison au peigne fin. La presse à scandale s’empare de l’affaire et désigne Nick comme le meurtrier, rappelant que la peine de mort est toujours appliquée dans le Missouri.

Alors que l’histoire du couple est dévoilée en parallèle par le journal intime d’Amy, qui raconte ses désillusions et accuse son mari de s’être montré violent à son égard.

Nick réagit : il prend l’avocat Tanner Bolt pour se tirer d’affaire, et va trouver les deux ex de sa femme, tous deux étant fichés par des accusations d’Amy pour se venger…

 

Critique

  • Dès les premières minutes, il ne faut pas être devin pour deviner qu’il n’y a ici ni meurtre, ni séquestration, mais un jeu dangereux entre un mari et une femme, et une volonté de manipuler et la police et les médias. C’est d’ailleurs le leitmotiv de David Fincher d’attaquer le spectacle médiatique comme une sorte d’arène que fascine les téléspectateurs.
  • La critique a beaucoup retenu la symbolique de la longévité du couple, de sa représentativité en public, sans montrer ses failles ni ses secrets ; on reste pourtant à mille lieues des Noces rebelles (2009) ! Le traitement reste très anecdotique.
  • Il semblerait que David Fincher ait choisi une fin différente du roman… A celle, attendue, d’une Amy déclarée vaincue, lui a été préférée une fin plus médiatique, jouant sur la manipulation, comme dans tout le film.
  • Seulement, si à la sortie du cinéma, on se repasse le film dans la tête, cette fin ne peut absolument pas fonctionner, à moins que le FBI soit complètement hypnotisé par cette femme et n’ouvre aucune enquête sur ses déclarations, que Nick n’essaie même pas de faire un test de paternité, etc..
  • Du reste, je n’ai pas boudé mon plaisir à regarder ce film, malgré tout…

 

Dieu en personne ** de Marc-Antoine Mathieu (2009)

05.12
2009

Dieu se présente un jour dans une file d’attente. Un homme somme toute banal. Après vérification de son identité qu’il est la seule à décliner,  étant évidemment sans papier, sans domicile fixe et sans numéro de sécurité sociale, il déclenche bien malgré lui, après un moment de stupeur dans le monde entier, une vague de procès : il a des comptes à rendre à l’humanité…

Au moyen d’un trait simple, en noir et blanc, Marc-Antoine Mathieu a toujours joué sur l’absurde et sur les frontières entre le réel et l’imaginaire, et ce de manière particulièrement réussie avec son personnage kafkaïen dans la série « Julius-Corentin Acquefacques ». Il imagine ici le personnage incontournable qui a le plus façonné fantasmes et imaginaire collectif à travers l’Histoire, Dieu, et le place devant le tribunal de l’humanité. Pour ce faire, il s’amuse à jongler avec tous les procédés narratifs susceptibles d’évoquer son bref passage sur Terre : médiatisé comme buzz de l’Histoire, Dieu devient ainsi tantôt le sujet d’une pièce de théâtre, d’un film, de best-sellers ou d’un message publicitaire, tantôt il fait l’objet d’une tentative d’analyse psychiatrique, sociologique, juridique, religieuse, picturale, philosophique ou encore scientifique. On ne le voit d’ailleurs jamais, si ce n’est de dos ; en revanche, on l’entend un peu, et ce qu’il révèle du bout des lèvres, c’est que la vérité nous dépasse, et qu’il lui faut disparaître pour redevenir une chimère, une invention de l’homme pour expliquer ce que ce dernier ne peut concevoir, et peut-être n’a-t-il jamais été qu’une bonne histoire, la meilleure qui soit, à l’image de cette BD, à ne pas manquer.

Vous pourrez lire les 8 premières planches du récit complet sur BD-Gest, et mes autres chroniques sur l’oeuvre de Marc-Antoine Mathieu :

- Mémoire morte **
- L’origine ***
La qu… *** (1991)
- Le processus *** (1993)

Le Début de la fin ** (1995)

La 2,333ème Dimension*** (2004)
les Sous-Sols du Révolu ** (2006)

MATHIEU, Marc-Antoine. – Dieu en personne. – Delcourt, 2009. – 122 p. : ill. n.b.. – ISBN 978-2-7560-1487-6 : 17,50 €.
Acheté en dédicace à BD’Boum de Blois.
Voir le commentaire sur l’ancien blog

Quand je serai roi d’Enrique Serna

13.03
2009

cop. Carnets de SeL

Titre original :  Uno sonaba que era Rey (Mexique, 2000)


 

Le Nopal, c’est le chef d’une bande de gosses de treize ans, shooté à la colle et gagnant quelques pièces en lavant les pare-brise aux feux rouges. C’est le fils de Carmen, pieuse repentante de ses ébats infâmes révolus avec son mari Jorge Osuna. Marquitos, lui, est un enfant hors du besoin, fils du riche directeur d’une station de radio « populaire » lequel organise un concours d’ »enfants héros ». On n’imagine pas ce que peuvent faire des parents et des enfants pauvres pour obtenir le million de pesos, ni ce qu’un gosse de riche désoeuvré peut faire avec la belle carabine de son père… 

Une peinture féroce de la société mexicaine, où aucun personnage n’est épargné, chacun prêt à la pire bassesse dès qu’il y a un peu d’argent en jeu. Un roman dur et grinçant.

 

« Inhaler. Protégé par un scaphandre en plastique, Jorge Osuna plonge son visage dans les eaux laiteuses de la colle. Les mains qui tiennent la poche de glu médicinale mollissent, vaincues par une tiède lassitude, comme si des brins de laine se répandaient dans les veines. » (incipit, p. 11)


SERNA, Enrique. – Quand je serai roi / trad. de l’espagnol (Mexique) par François Gaudry. – Métailié, 2009. – 263 p.. – ISBN 978-2-86424-675-6 : 18 €.