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La lenteur de Milan Kundera

28.08
2020

IMG_20200808_104659Vera et Milan Kundera séjournent dans un château où a lieu un colloque d’entomologistes. Un scientifique tire une larme à l’assistance avant d’être ridicule, un autre insulte son ex-maîtresse qui réalise un reportage sur lui, laquelle traite son amant cameraman comme un chien avant de se jeter à l’eau magistralement, un autre encore, Vincent, simule un coït en bord de piscine, mais tous ont besoin d’un public pour briller en se démarquant. Parallèlement, dans un récit de Vivant Denon au 18e siècle, un jeune chevalier passe une belle nuit d’amour avec madame de T., qui devra rester secrète, même en lui faisant rencontrer cet autre libertin du 20e siècle…

Réflexions et récit s’entremêlent pour évoquer la versalité du public, la relativité d’une expérience dite courageuse, l’égocentrisme et le besoin de briller, et puis un éloge de la lenteur versus la vitesse de notre époque contemporaine, à commencer par celle de nos déplacements, mais surtout celle de nos ébats amoureux, qui seraient bien davantage sauvés de l’oubli en cultivant l’art de la mise en scène, en ménageant le suspens et la diversité des espaces.

Mes passages préférés se trouvent aux pages 10, 12, 37, 44-45, 49, 51, 64, 86, 89.

Théorie du corps amoureux ** de Michel Onfray

11.09
2005
Pour une érotique solaire : relecture

« De quelle façon aimer sans renoncer à sa liberté, son autonomie, son indépendance – et en tâchant de préserver les mêmes valeurs chez l’autre ? » (p. 34)

De nos jours encore, la norme établie par l’idéal ascétique judéo-chrétien et platonicien , liberticide et misogyne, est restée profondément ancrée dans nos coutumes, à tel point que notre destin semble tout tracé : trouver sa moitié, fusionner en un couple, faire des enfants. Il nous faut trouver notre moitié pour être complet, voilà la définition de « l’amour comme recherche de la complétude originaire« , comme vide à combler, absence à conjurer. Le mariage conclu, le désir est nié, interdit, refoulé. On devient mari ou femme fidèle, puis père ou mère s’oubliant pour éduquer ses enfants. Or « il n’y a rien à trouver », s’exclame Michel Onfray : la moité perdue est mythique. On s’épuise peine perdue à sa recherche pour finalement  arrêter son choix et ses désirs sur une seule personne jusqu’à la mort. A cette vie sclérosante, niant le désir et les plaisirs, Michel Onfray oppose une érotique hédoniste, formulée par Lucrèce et Epicure, celle du libertinage (« cet art de rester soi dans la relation à autrui », p. 35), à laquelle s’initient les enfants et adolescents en découvrant leur corps et celui des autres, dans l’ignorance encore des codes sociaux qui les enfermeront ensuite dans une monogamie procréatrice. Car « le désir est naturellement polygame, insoucieux de la descendance, systématiquement infidèle et furieusement nomade. Accepter le modèle dominant suppose une violence infligée à sa nature et l’inauguration d’une incompatibilité d’humeur radicale avec autrui en matière de relation sexuée. » (p. 26)Aussi comment peut-on être épicurien aujourd’hui dans le domaine des relations sexuées ? Que nous propose Michel Onfray en s’inspirant de Diogène de Sinope, d’Aristippe de Cyrène, d’Epicure, de Lucrèce, d’Ovide et d’Horace, entre autres penseurs hédonistes cyrénaïques, cyniques, épicuriens ?


Sachant que « la somme des plaisirs doit toujours être supérieure à celle des déplaisirs » (p. 91), on choisira d’obéir à la libido, de consentir au désir sexuel et sensuel, de séduire, de plaire, de conquérir, de découvrir, de jouir, ou de refuser une volupté trop chèrement payée, une solitude appréhendée ou encore une séparation douloureuse si l’on s’attache à son/sa partenaire. On prendra soin de conserver sa liberté à tout moment et de réviser son jugement, si les déplaisirs commencent à peser plus lourds que les satisfactions.


Car on est toujours seul : « naître, vivre, jouir, souffrir, vieillir et mourir révèlent l’incapacité à endosser une autre histoire que la sienne propre et l’impossibilité viscérale, matérielle, physiologique, de ressentir directement l’émotion de l’autre. » (p. 96)

« Carpe diem, quam minimum credula postero« 
cueille le jour, sans te fier le moins du monde au lendemain.

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