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Dernière demeure ** de Jacques Ferrandez (2007)

23.12
2010

Carnets d’Orient : tome 9

1958 : De Gaulle ne répond pas aux attentes des gradés et aux pieds noirs qui souhaitent le maintien d’une Algérie française. Octave et Samia prennent le risque de partir du Canada, où ils se sont réfugiés après avoir échappé à une tentative d’assassinat, pour rentrer assister aux obsèques de Casimir, le père adoptif d’Octave…

Jacques Ferrandez poursuit l’histoire mouvementée de ses personnages en plein coeur de la guerre d’Algérie. Plus question d’échapper à l’omniprésence de De Gaulle à partir de 1958 : il lui fallait le dessiner ; ce sera en noir et blanc, perçu depuis l’image d’un téléviseur. Impossible aussi de ne pas évoquer la torture : ce sera chose faite par l’intermédiaire d’une jeune recrue, mise au parfum par un légionnaire. Avec beaucoup de sensibilité et d’intelligence, Jacques Ferrandez continue de nous faire saisir toute l’intensité de ces années de lutte, et en particulier la complexité des rapports humains. Un classique désormais.

En préface, le témoignage de Fellag, comédien, écrivain, humoriste né en 1950 en Algérie : en quelques anecdotes il raconte la traque des Fellagha dans les villages, qui passe par des séances de torture morale et physique des plus anciens, la Casbah en pleine ébullition, la ségrégation raciale et sociale.

Dernière demeure / Jacques Ferrandez. – [Bruxelles] ; [Paris] : Casterman, DL 2007 . – 61 p. : ill. en noir et en coul., couv. ill. en coul. ; 31 cm. – (Carnets d’Orient ; 9). - Bibliogr., 1 p.. - ISBN 978-2-203-00368-2 (rel.) : 14,95 EUR. – EAN 9782203003682

Emprunté à la médiathèque

Le palmier et l’étoile de Leonardo Padura

29.01
2009

cop. Métailié

De retour à La Havane, après 15 ans d’exil, Fernando Terry continue à être tourmenté par deux quêtes : celle d’apprendre lequel de ses amis l’a trahi et brisé sa vie, et celle de trouver enfin le mystérieux manuscrit autobiographique de son modèle, le grand poète José Maria Heredia, auquel il a consacré sa thèse.

« Ce décès, le premier des nombreuses disparitions d’êtres chers que je devais affronter tout au long de ma vie, me confronta violemment à l’évidence de la fragilité de l’existence humaine : cet enfant, que j’avais vu rire et grandir, avait soudain contracté de terribles fièvres et deux jours plus tard, il n’était plus qu’une dépouille humaine, placée dans un cercueil blanc. La fragilité de la ligne de vie m’apparut aussi dramatique et réelle que les vanités et les prétentions matérielles des hommes pouvaient sembler irréelles. » (p. 70)


Indistinctement, deux destins s’entremêlent, Leonardo Padura passant allègrement d’un narrateur à l’autre, de Fernando à Heredia, voire au fils de ce dernier, d’une époque à l’autre, si bien que leurs vies semblent se faire écho et se confondre dans un troublant cycle historique, entre leurs rencontres avec leur muse, leurs amours impossibles, leurs ambitions poétiques, leur engagement politique, la trahison de leurs amis et leur exil. Habitué à ses polars, on découvre là un premier grand roman de Leonardo Padura, riche, ample et complexe, donnant à voir à travers les décennies un même visage de Cuba.

« Ce retour imprévu de l’amour et de la poésie était trop alarmant et le besoin physique et mental d’avoir Delfina à ses côtés lui était douloureux, comme la sensation vivifiante de se tuer à petit feu chaque fois qu’il allumait une cigarette et qu’il emplissait ses poumons de cette fumée maligne et délectable. » (p. 232)

 

PADURA, Léonardo. – Le palmier et l’étoile / trad. de l’espagnol (Cuba) par Elena Zayas. – Métailié, 2009. – 389 p.. – (Suite hispano-américaine ; 143). – ISBN 978-2-86424-672-5 : 11 euros.