Mots-clefs ‘esclavage’

Chantier interdit au public de Claire Braud

26.07
2017
cop. Casterman

cop. Casterman

Hasan vient d’être embauché comme ferrailleur dans la boîte d’intérim « Pauvre comme Job », dirigée par Dominique et Jacqueline. Sur le chantier, il retrouve Souleymane, qui vient d’obtenir ses papiers, après 15 ans, et qui aimerait du coup être embauché sous son vrai nom et obtenir un meilleur poste, malgré le racisme ambiant…

Gloups ! Dans cette BD, on a bel et bien l’impression de plonger dans l’esclavage moderne : les boîtes d’interim raflent les indemnités de leurs sous-traitants qu’ils traitent comme du bétail, les entreprises du bâtiment perdent le moins de temps possible sur l’échéancier en ne respectant pas les consignes de sécurité et en maltraitant leurs intérimaires. Les blancs sont en haut de l’échelle, et les noirs et les arabes au plus bas, quel que soit leur niveau réel de compétences. Bref c’est un travail précaire, dangereux et sous-payé sous le règne du régime de terreur. Encore une BD bien édifiante sur les conditions de travail dans ce secteur… Cela fait peur !

Dictionnaire des esclavages *

15.03
2010

L’esclavage n’est pas « naturel », ni entièrement soluble dans l’économique, dans l’idée d’exploitation ou dans un système de production donné :

- l’esclave est « toujours un Autre ou quelqu’un transformé en un autre, et exclu d’une dimension fondamentale dans la vie du groupe de ses maîtres. » (p. 15) « Lorsque l’esclave vient d’au-delà des limites du groupe, il est souvent capturé et/ou acheté. » (p. 16)

- il est « la « propriété » de son maître. »

- il « peut voir son humanité être remise en cause, et être comparé à une chose ou à un animal. » (p. 17)

- enfin il est toujours « utile » à son maître.

Après avoir tenté de définir ce qu’était l’esclavage, ce collectif d’historiens en décline les temps forts dans l’histoire, mettant d’abord l’accent sur le fait que le « bon sauvage » aussi fut souvent esclavagiste, puis en observant ses flux et reflus, ses permanences et mutations dans l’Histoire et à travers le monde entier, pour enfin s’attarder sur ses formes contemporaines :


- esclavage par dette et trafic d’enfants (Afrique noire, Inde, Indonésie),

- exploitation de main d’œuvre (Afrique, Amérique latine, Moyen-Orient),

- esclavage sexuel (Asie du sud-est),

- servitude de domestiques séquestrés par des « maîtres » et privés de papiers, souvent d’origine étrangère dans les pays occidentaux (Europe, Amérique latine, Asie, Afrique).

S’ensuit un dictionnaire proposant plus de deux-cent entrées, géographiques, historiques, thématiques. On constatera ainsi, par exemple, qu’aucun continent ne fut épargné, et qu’aucune religion n’a remis en cause l’esclavage, même le bouddhisme, et même si parfois certaines auront tenté d’en adoucir les conditions.


Édifiant !


Dictionnaire des esclavages / sous la dir. d’Olivier Pétré-Grenouilleau. – Larousse, 2010. – 575 p.. – (A présent).. – ISBN 978-2-03-583785-1 : 28 €.

Zumbi de Jean-Paul Delfino

07.09
2009

Zumbi

Tout bascule lors d’une belle matinée de printemps, quand Semba voit arriver des hommes armés de bâtons de fer et d’acier crachant le tonnerre et la mort. Capturé avec les siens, du moins avec ceux valides, les autres, bébés et vieillards étant assassinés, il part pour un long périple qui le mènera d’Angola au Brésil pour y être vendu comme esclave. Chose incroyable, alors que les nègres sont à l’époque moins considérés que des bêtes, Dona Josefina, sa jeune maîtresse cultivée, découvre et son attirance pour lui et sa conversation. Dès lors, il est partagé entre son désir de cette belle blanche et son rêve de recouvrer la liberté et de rejoindre un jour dans la jungle le plus grand quilombo, habité par des milliers de Nègres évadés, avec pour chef le redoutable Zumbi…

« Ceux qui ne voulaient pas obéir recevaient instantanément trois coups de fouet. Le premier les laissait pantois. Le deuxième leur arrachait un hurlement de douleur. Au troisième, ils devenaient doux et soumis, et le sentiment de leur propre soumission leur emplissait les yeux de larmes muettes. » (p. 51)


Avec Corcovado**** (2005), Dans l’ombre du Condor*** (2006), Samba triste*** (2007), publiés chez Métailié, Jean-Paul Delfino nous avait régalé d’une trilogie sur le Brésil couvrant tout le 20e siècle. Nul doute que l’un des personnages principal de cette trilogie, Zumbi, l’ait été inspiré et lui ai donné envie de nous faire découvrir son ancêtre. Au fil de sa destinée, il nous fait ainsi le récit des innombrables exactions commises au 17e siècle par les Portugais qui, non contents d’avoir dérobé les terres des Indiens, avaient fait venir par milliers à bord de leurs négriers, des Africains pour les réduire en esclavage et les traiter bien pire que leurs bêtes. Avec l’injustice sociale et le racisme, on y retrouve d’autres thèmes chers à l’auteur, comme la liberté, l’amitié, le sexe, l’amour et le plaisir de la bonne chère. Gardant toujours l’intérêt de son lecteur éveillé à la clôture de ses chapitres, cet habile conteur nous plonge très vite dans cette nouvelle histoire d’amours et de haines au Brésil fondée sur une  documentation solide. Ne boudez pas votre plaisir et faites le plein d’émotions en ouvrant ce beau roman d’aventures.

Du même auteur :

Chair de lune ** (2001)

- Corcovado *** (2005)

Dans l’ombre du Condor *** (suite de Corcovado – 2006)

Samba triste *** (fin de la trilogie – 2007)

Nous avons aussi fait sa connaissance ici.

DELFINO, Jean-Paul. – Zumbi. – Paris : Buchet/Chastel, 2009. – 471 p. : couv. ill. en coul.. – ISBN 978-2-283-02397-6 : 23,50 €.

La petite morte de Cornelio Penna

31.05
2009

cop. Métailié

A Menima morta

Dans un Brésil impérial de la fin du 19e siècle, à la fazenda du Grotao, une petite fille est morte, Sinhazinha. Et autour de sa mort, dans cette plantation de café, les angoisses des serviteurs noirs comme de leurs maîtres se cristallisent…

 

Ce roman d’atmosphère, très descriptif, construit à partir d’une absence, reflète la tension de l’époque, où commençaient à sourdre les débats autour de l’abolition de l’esclavage.

 

PENNA, Cornelio. – La petite morte / trad. du portugais (Brésil) par Cécile Tricoire. – Métailié, 2009. – 425 p.. – (Suite brésilienne ; 149). – ISBN 978-2-86424-683-1 : 13 €.