Mots-clefs ‘anarchisme’

Louise Michel : la Vierge rouge de M. & B. Talbot

23.11
2016
cop. Vuibert

cop. Vuibert

La biographie de Louise Michel m’est pour le moins familière, m’étant intéressée de près à cette figure féministe et anarchiste de la Commune, au point de vouloir en écrire le biopic. Le même mois où je découvre que La Danseuse, biopic de Loïe Fuller sur lequel je travaillais, était portée au grand écran, j’aperçois donc cette bande dessinée publiée en dehors du circuit des grands éditeurs, fruit du travail d’un couple de britanniques. C’est ce qu’on appelle l’herbe coupée sous le pied, par deux fois.

Priorité a été donnée ici à son action pendant la Commune, et à son parti pris contre les injustices sociales partout où elle va, à Paris comme en Guyane. Coup de projecteur pertinent, mais qui ne met du coup pas en lumière toutes ses autres activités du quotidien, d’éducation et de transmission notamment. De même, le dessin de Monique est simplifié à l’extrême : pourquoi ? Choix a également été fait de faire ressortir le rouge du noir et blanc, qui éclate parfois sur les planches. Bref j’ai bien aimé mais regretté que le scénario ne nous semble qu’effleurer le personnage, comme s’il restait à distance, sans vraiment lui donner corps, nous le faire connaître, nous faire entrer en lui en nous faisant partager ses émotions et sa vie.

Les vieux fourneaux de Lupano et Cauuet

12.10
2016
cop. Dargaud

cop. Dargaud

Série en cours 

Chronique des trois premiers tomes

Pierrot déloge Mimile de sa maison de retraite pour débarquer un peu tard aux obsèques de Lucette, l’épouse d’Antoine, leur vieil ami d’enfance. Le lendemain, de retour d’une visite chez le notaire, Antoine prend son fusil et part en voiture sans un mot. Très vite, ils apprennent que leur ami est parti en Toscane pour y abattre Garan Servier, qui coule ses dernières années là-bas, après avoir été le propriétaire de l’importante usine pharmaceutique de la région, et avec qui il a pu en découdre, dans la lutte syndicale. Enceinte jusqu’aux yeux, Sophie, la petite-fille d’Antoine et Lucette, revenue reprendre le théâtre de marionnettes de sa grand-mère, les y conduit dans la petite camionnette rouge du théâtre…

La vieillesse ne leur a pas volé leur énergie, à ces trois compères, forts en caractères ! Pierrot surtout ne recule devant rien, avec son groupuscule anarchiste de vieux aveugles « Ni yeux ni maîtres » qui perturbe à Paris les meetings et réunions de droite. Et les réparties de la petite-fille, Sophie, sont tout aussi explosives que celles de ces trois énergumènes. Le scénariste nous promène un peu, avec ses histoires de legs, de trésors et de gros sous, qui finalement ne pèsent pas lourd par rapport à la manière de vivre et de voir la société de ces quatre personnages hauts en couleurs, de sensibilité anarchiste. En soi, rien de particulièrement original dans les rebondissements et les révélations, mais quel fou rire avec certains épisodes comme ce mouton qui se croit dans Chicken run, ce vieil abstinent au meeting de Copé, ou encore ces 36 sortes de baguettes qui métamorphosent Sophie.

De quoi passer un bon moment !

LAP ! Un roman d’apprentissage d’Aurélia Aurita

29.12
2015
cop. Les Impressions Nouvelles

cop. Les Impressions Nouvelles

Hantée par l’examen du baccalauréat, Aurélia Aurita, auteur BD chez  Fluide glacial, décide de s’immerger un an dans un lycée très singulier, sans proviseur, sans  administration,  sans intendance,  sans CPE ni surveillants, le LAP, Lycée Autogéré de Paris… par les professeurs et les élèves. Car ici deux principes animent l’établissement : l’autogestion et la  libre fréquentation. Pour valider son année, il faut juste au minimum 12 à 15 U.V. dont au moins une dans chaque domaine : U.V. de cours, semaines de stage, U.V. de gestion, projets et ateliers.

Notre jeune dessinatrice s’attache vite aux différentes individualités qui fréquentent le bahut, lapiens et lapiennes, certains en révolte au fond du jardin, ce qui rend son reportage profondément humain. Cette pédagogie alternative proche de l’anarchisme, intéressante, mais qui me laisse dubitative, ne colle pas tout à fait à mes attentes d’une autre façon d’enseigner.

Les impressions nouvelles (coll. For intérieur), janvier 2014.
144 p.
ISBN 978-2-87449-185-6 : 15 euros.

La bande à Bonnot

13.05
2014

lanarchieGenre : film historique

Sortie en salle : 1968

Scénaristes : Jean-Pierre Beaurenaut, Pierre Fabre et Rémo Forlani

Réalisateur : Philippe Fourastié

Résumé 

Fin novembre 1911, Bonnot fait la connaissance de plusieurs sympathisants anarchistes, parmi lesquels Octave Garnier et Raymond Callemin dit « Raymond-la-science ». Dans le scénario, il récupère une mallette qu’ils viennent de lui voler, alors qu’en réalité, Bonnot serait venu au siège du journal anarchiste. Cette rencontre finit de leur faire rompre avec l’idéologie toute théorique de Victor Serge : ils veulent de l’action. Et pour cela, ils ne vont pas tarder à rejoindre Bonnot, plus expérimenter, pour voler banques et riches, et pour tuer dans la foulée tous ceux qui représentent le camp du Capital, les bourgeois. C’est ainsi qu’à bord d’une limousine Delaunay-Belleville verte et noire de 12 CV, modèle 1910, ils tirent sur le garçon de recette de la Société générale. C’est la première fois qu’une voiture est utilisée pour commettre un braquage : l’événement fait la Une de tous les journaux, la police se lance à la poursuite des malfrats qu’elle sait anarchistes, pour un texte retrouvé dans la voiture laissée à Dieppe…

Analyse 

Difficile de raconter une réalité historique sans la trahir : les scénaristes, pour ce faire, ont choisi de prendre quelques libertés, notamment lors des circonstances de leur rencontre, rendues plus amusantes et pertinentes, du siège de la police et de leur mort. C’est bien plus Raymond la Science qui fait office de personnage principal ici, que Jules Bonnot qui tient plutôt le rôlé de mentor-allié dans un parcours presque régressif, entraîné et dépassé par la violence de ses comparses. Un bon film, aux personnages non pas attachants, mais identifiables et fascinants, qui avait de quoi plaire aux Enragés de mai 68.

La zone du dehors d’Alain Damasio

08.01
2012

 

cop. Folio

 

Professeur de philosophie au grand jour, Capt aime le soir à s’aventurer illégalement dans la Zone du Dehors, à l’extérieur des limites de la métropole climatisée Cerclon, satellite de Saturne. Mieux, il est dans les coulisses à la tête de la Volte, mouvement contestataire de [ré]voltés, laquelle dénonce à l’aide de « clameurs » une société de consommation basée sur l’avoir, une pseudo-démocratie ultra-policée pour protéger ses citoyens de tout conflit, et un système de notation et d’identification des citoyens résumant leur individualité à leur rang social. Arrivent les technogreffes qui, introduites dans le corps des citoyens, leur inoculent le plaisir voulu : un nouveau pas vers la perte consentie de la perception physique de la réalité et, à terme, de de la liberté individuelle, estiment les Voltés…

 

Premier roman de l’auteur, La Zone du dehors est un roman de science-fiction politique, qui, comme Fight Club, attaque la société de consommation en ceci qu’elle privilégie la possession d’objets aux sensations physiques,

« Un message publicitaire nie la vie parce qu’il dégrade les désirs en besoins. »

(p. 246)

et qui, contrairement à 1984, ne dénonce pas une dictature mais une démocratie, cent ans après, en 2084 :

«le summum du pouvoir : une aliénation optimum sous les apparences d’une liberté totale. »

(p. 368)

Qui plus est, sous couvert de raconter un futur possible en campant un intellectuel anarchiste influencé par les idées de Nietzsche, Foucault et Deleuze, Alain Damasio, fantasmé en Capt, dénonce nos démocraties présentes, aseptisées, érigées sous une fausse alternance. Malgré tout, il a la présence d’esprit de nuancer son discours d’anarchiste {ré}volutionnaire, en l’opposant dans un dialogue au point de vue censé de A, Président de la Clastre, et en en montrant les limites et les revers. Au final, il nous livre une démonstration éblouissante d’une pensée politique qui se cherche dans ses moyens d’éducation des non-initiés et dans ses mises en application inspirées des demi-succès confidentiels et des échecs des milieux libres du début du siècle :

« Ce qu’il y a d’extraordinaire chez tous les révolutionnaires que j’ai rencontrés, monsieur Capt, c’est que, comme vous, ils voient le peuple à leur image : bon, généreux, énergique… c’en est presque émouvant – peut-être faut-il voir dans cette chimère une manière de narcissisme, un égocentrisme qui vous est propre, je ne sais pas, ce serait à creuser. » (p. 369)

Beaucoup aimé

 

Un excellent roman d’anticipation politique.

 

Gallimard, 2010. – 650 p. – (Folio ; 350).

Cadeau d’Alexis.

 

Les milieux libres ** de Céline Beaudet (2006)

05.08
2011

Vivre en anarchiste à La Belle Epoque en France

Méconnus voire méprisés, les milieux libres ont moins été étudiés que les différentes mouvances anarchistes et le syndicalisme révolutionnaire, d’autant qu’ils se soldèrent par un échec… Céline Beaudet tente ici de dresser l’historique des ces différentes tentatives de vivre en accord avec ses théories politiques, au sein de communautés :

- le Milieu Libre de Vaux (1902-1907), réunissant de nombreux sociétaires, parmi lesquels Henri Zisly, auteur de Voyage au beau pays de Naturie (1900) et Emile Armand, anarchiste individualiste auteur de nombreux ouvrages et journaux,

- « L’Essai » d’Aiglemont (1903-1908),

- la colonie anarchiste de Ciorfoli (1906) en Corse,

- la colonie de La Rize (1907),

- le Milieu libre de Bascon (1911) qui se transformera par la suite en colonie naturiste.

Puis elle en examine les modalités : abolition du régime salarial pour créer des coopératives agricoles ou ouvrières, réduction des besoins alimentaires et vestimentaires, expériences végétariennes, naturistes, d’amour libre, coéducation sexuelle, éducation physique, manuelle, intellectuelle, rôle éducatif du père comme de la mère, mais aussi de toute la communauté, limitation des naissances…

Mais en vivant hors de la société, comment pourrait-on la changer ? C’est la principale critique que les autres anarchistes font à ces individualistes, en plus de celle de leur effectif risible et de leur abandon de la lutte sociale. Et comment faire alors de leurs enfants des révolutionnaires, ou tout au moins des révoltés ? Ou s’agit-il plutôt comme à La Ruche de former des individus avisés pour transformer la société ?

En outre, la plupart des anarchistes, même en milieu libre, reproduisaient le partage des rôles féminin et masculin, même si le milieu favorise la libération de la femme, moins d’un patron que d’un mari. Mais si ces milieux avaient duré, peut-être les générations suivantes, filles et garçons ayant reçu la même éducation, n’auraient plus suivi ce schéma… A ce propos, il est à noter que les milieux libres ont pu faire preuve d’eugénisme dans leur recrutement, préférant accueillir des enfants en bonne santé et aux capacités intellectuelles avérées, car leur expérience reposait sur l’espoir d’un « homme nouveau », accordant de l’importance au corps par l’éducation physique, recherchant « un environnement et une alimentation saine, jusqu’à un habillement qui n’entrave pas le mouvement. » (p. 96).

A l’époque, ces entreprises de communautés d’individus, voulant abolir tout principe de domination, de hiérarchie, toute structure figée, ont échoué, ayant peu duré, souvent peu tolérées par l’extérieur, par un voisinage inquiet et une police intrusive, mais aussi mises à mal de l’intérieur, avec un budget difficile à équilibrer, et une instabilité structurelle due au refus de tout autorité. Le « colon-type » devait se débarrasser de tout préjugé, être ni envieux, ni jaloux, ni paresseux, et être plus sévère avec lui-même qu’envers les autres… Mais surtout, lui, l’individualiste devait subir la pression du groupe, notamment au niveau de la sexualité, de l’alimentation et de la participation au travail commun. Finalement, comme dans toute entreprise communiste, l’individu devait se sacrifier au profit de la communauté… Et c’est peut-être là la principale raison de l’échec de ces milieux repliés sur eux-mêmes…

Un aperçu instructif de cette solution pour tous ceux qui en eurent assez de préparer la révolution, d’attendre un hypothétique « Grand Soir » et qui ont eu le courage de vouloir mettre en pratique leurs idées, et de vivre en anarchiste, loin de tout préjugé. Une expérience qui se révéla alors être une révolution permanente.

 

A lire également :

Jacques Déjacques L’Humanisphère

Henri Zisly Voyage au beau pays de Naturie (1900)

Thomas More L’Utopie

le moine Campanella Cité du soleil

William Morris Nouvelles de nulle part

Jean Grave Aventures de Nono

Emile Zola Travail

Lucien Descaves La Clairière (pièce de théâtre, 1900), qui décrit le fonctionnement, les déboires et les succès d’un milieu libre.

 

Les milieux libres :  vivre en anarchiste à la Belle époque en France / Céline Beaudet. - [Saint-Georges-d'Oléron]  : les Éditions libertaires , 2006.- 253 p.-[32] p. : ill., couv. ill.  ; 21 cm. - Bibliogr. p. 240-244. - ISBN 2-914980-28-0 (br.) : 15 €.

Une société à refaire *** de Murray Bookchin (1989)

11.05
2011

 

copyright les éditions écosociété

 

 

 

Une société à refaire : Pour une écologie de la liberté

Que veut dire Murray Bookchin (1921-2006), militant et essayiste américain éco-anarchiste, lorsqu’il parle d’une société à refaire dans une perspective écologique ?

« Quels sont les facteurs qui ont produit des sociétés humaines écologiquement nuisibles ? Et quels sont ceux qui pourraient créer des sociétés humaines bénéfiques à l’environnement ? »

Il part en effet du triste constat qu’ »alors que les sociétés anciennes tentaient de développer le respect des vertus de coopération et d’altruisme, donnant ainsi un sens moral à la vie sociale, la société moderne encourage la croyance dans les valeurs de compétition et d’égoïsme, privant donc les associations humaines de toute signification, sauf peut-être lorsqu’elles ont pour but le profit et la consommation irresponsable.  » (p. 27)

« La certitude que la technologie et la science amélioreraient la condition humaine a été battue en brèche par la prolifération des armes nucléaires, par la famine massive dans le tiers monde et la pauvreté en Occident. La croyance fervente dans le triomphe de la liberté sur la tyrannie est démentie par la centralisation croissante des Etats partout dans le monde et par les bureaucraties, les forces policières et les techniques de surveillance sophistiquées (…)«  (p. 28) Difficile d’espérer former une vaste communauté de groupes ethniques, ajoute-t-il, avec « la montée du nationalisme, du racisme et d’un esprit de clocher qui encourage l’indifférence aux souffrances de millions d’êtres humains. »

D’autre part, remarque-t-il, presque tous les problèmes écologiques sont des problèmes sociaux, suscités par des nécessités économiques. Car « si la nature devient simplement des « ressources naturelles », c’est que les gens sont considérés comme de simples « ressources économiques« . (p. 200)

Comment changer la donne ? Pour ce faire, il commence par éliminer deux perspectives extrêmes : le Vert misanthrope qui, sans remettre en cause la société elle-même, croit que l’être humain est intrinsèquement néfaste et devrait être dominé par la Nature, au lieu de menacer la survie du monde vivant avec son incroyable puissance destructrice, et le capitaliste qui pense encore que la nature doit être dominée par l’Homme. D’un côté, avec sa « mentalité biocentrique et antihumaniste, qui réduit l’être humain à une simple espèce animale parmi les autres et à faire de l’intelligence humaine la plaie du monde naturel », comme de l’autre, le rapport entre dominant et dominé règne.

Murray Bookchin défend alors l’idée que la domination de l’humain par l’humain est à l’origine non seulement de la société inégalitaire que nous connaissons, mais aussi, par voie de conséquence, à cause des principes d’expansion du capitalisme, du « toujours plus », des problèmes écologiques.

Aussi propose-t-il ce qu’il appelle une écologie sociale, théorie philosophique, sociale et politique sur le rapport entre l’homme et son environnement, qui s’inspire de certains penseurs, anarchistes comme Kropotkine et Bakounine, communistes comme Marx, ou philosophes, comme Hegel.

Parmi les solutions préconisées pour cette future Nouvelle Gauche, on peut noter :

  • Linterdépendance entre les membres de la société : valoriser la participation, l’entraide, la solidarité, l’empathie, le potentiel créatif chez les individus, et la capacité à changer de la société. Privilégier les grandes réalisations de la pensée humaine, de l’art, de la science et de la technique, monuments à l’évolution naturelle. Revenir aux dons et aux rejets des choses inutiles, et non plus à l’accumulation des biens et à l’expansion des désirs.
  • L’élimination de toute hiérarchie sociale et politique : jeunes/vieux, hommes / femmes, riche / pauvre, ethnie / ethnie,…. et pour ce faire la suppression d’un appareil institutionnel liberticide et hiérarchisant, d’une justice arbitraire, clémente avec les nantis, du capitalisme, dont le leitmotiv est la croissance pour la croissance, et d’ »accumuler pour affaiblir, racheter, absorber ou dominer d’une façon ou d’une autre le concurrent«  (p. 135) et de l’Etat-nation faisant place à…
  • une démocratie directe, structurée autour du principe du municipalisme libertaire, les assemblées adoptant une disposition géométrique particulière, le cercle, où il n’y a ni présidence, ni direction formelle. Elle s’inspire de la Cité Athènes dans l’Antiquité  ainsi que de la Commune de Paris (1871) pour la prise de décisions politiques.
  • La décentralisation : la société prendrait la forme d’une confédération de communes décentralisées et liées entre elles par des liens commerciaux et sociaux. Des sources d’énergies renouvelables dispersées permettraient d’alimenter ces communautés à tailles humaines et d’apporter à chacun selon ses besoins.
  • Un citoyen actif : de l’électeur anonyme, contribuable passif payant ses impôts, qu’il est actuellement, que chaque individu soit impliqué dans les transports, le logement, les services sociaux de sa ville ; qu’il soit bien informé, ait le sens de son devoir civique, et surtout, qu’avec une grande maîtrise de soi et une grande discipline, il fasse passer le bien de la communauté – l’intérêt général – avant son intérêt personnel.
  • Une technologie libératrice : ne plus penser en fonction d’une technologie capable de produire le bien-être matériel pour tous, pour se concentrer sur le bien-être moral de tous. De la même façon que « personne n’a le droit de posséder ce dont dépend la vie d’autrui – que ce soit d’un point de vue moral, social ou écologique, (…) personne n’a le droit de concevoir, d’utiliser ou d’imposer à la société des technologies privées capables de nuire à la santé humaine ou à celle de la planète.« (p. 275) « (…) une centrale nucléaire est quelque chose de mauvais en soi, dont l’existence ne peut en aucun cas se justifier. Aujourd’hui, aucune personne bien informée ne doute que l’augmentation de la taille des réacteurs nucléaires ne finisse par transformer la planète en une gigantesque bombe nucléaire s’il se produit suffisamment d’accidents du type Tchernobyl – et, avec l’accroissement du nombre de centrales, cela ne relève plus de l’accident, mais du calcul des probabilités. » (p. 276). Il nous faut privilégier l’énergie solaire, l’énergie éolienne. Il nous faut revenir à une agriculture biologique, et même cultiver notre jardin, pour ne plus simplement consommer, mais produire tout ou partie de notre nourriture, solliciter nos corps pour bêcher, désherber, planter, récolter plutôt qu’aller dans des centres de remise en forme, composter, comprendre le rythme des saisons, le cycle de la croissance et de la destruction. Les déchets seraient récupérés et recyclés. Enfin, « la production mettrait l’accent sur la qualité plus que sur la quantité : on fabriquerait des maisons, des meubles, des outils, des vêtements pour qu’ils durent des années, ou, selon les cas, des générations. » (p. 287)

Un essai particulièrement brillant et accessible, formulant un certain nombre de propositions sociales, politiques et écologiques séduisantes. A lire sans tarder ces idées qui changeraient vraiment la donne.

  • BOOKCHIN, Murray. – Une société à refaire. – Montréal : Les éditions écosociété, 1993. – 300 p.. – ISBN 2-921561-02-6 : 13,40 €.
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