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La forêt millénaire de Jirô Taniguchi

21.03
2018

P1140786Au début de l’été, dans les années 50, Wataru, âgé de dix ans et demi, est accueilli chez ses grands-parents, suite au divorce de ses parents et à la maladie de sa mère. De la capitale il débarque seul dans un village dans la région de San’in, au coeur des montagnes et d’une nouvelle forêt mystérieuse. Lorsqu’un groupe de ses nouveaux camarades de classe cherche à le tester, il grimpe au « grand arbre » et il lui semble entendre sa voix l’encourager…

Quelle frustration que cette histoire inachevée ! Jirô Taniguchi, décédé le 11 février 2017 à l’âge de 69 ans, n’a pas pu achever cet album, une commande des éditions Rue de Sèvres, qui devait être le premier d’une série de cinq tomes. Ce serait une bonne idée, en s’appuyant sur les ambitions de l’auteur, de proposer un concours de scénario pour inviter les lecteurs à écrire la suite !

Les thèmes chers à Jirô Taniguchi, qu’ils partagent avec Miyazaki (Princesse Monoké, Nausicaa), occupent ici toute l’histoire, celle de l’homme non plus maître de la Nature mais de l’humain en symbiose avec la Nature, celle de la construction de l’enfant sur une transmission familiale.

Le format à l’italienne valorise les magnifiques dessins en pleine page à l’aquarelle, tout en nuances de vert, qui contribuent à générer un sentiment de paix et de sérénité chez le lecteur.

L’ouvrage est complété par un dossier « Les racines du projet » réalisé par Corinne Quentin et Motoyuki Oda, éditeur de Taniguchi au Japon, et un carnet de croquis.

 

La librairie Le Temps retrouvéAcheté à la librairie au temps retrouvé de Villard-de-Lans, seule librairie du Vercors.

et lu à Méaudre

 

 

 

Les gardiens du Louvre de Jirô Taniguchi

02.11
2016
cop. Futuropolis

cop. Futuropolis

 

On découvre avec surprise cette bande dessinée de Jirô Taniguchi au format européen, qui se lit néanmoins à la japonaise, de droite à gauche. C’est le onzième opus de la collaboration entre les éditions Futuropolis et le musée du Louvre.

Jirô Taniguchi revisite ici le syndrome de Stendhal à travers un personnage à forte empreinte autobiographique, qui profite de cinq jours à Paris pour visiter le Louvre. Et ce n’est autre que la Vénus de Samothrace qui le guide dans les méandres du musée pour voir la Joconde le premier jour. Le second, il satisfait alors son désir de voir les peintures de Corot, qu’il admire profondément, et se retrouve dans la forêt à dessins du peintre. Le troisième jour, il part à Auvers-sur-Oise sur les traces de Vincent Van Gogh, qu’il retrouve. Le quatrième, ce sont sur les paysages de Daubigny qu’il s’arrête. Et enfin, le dernier jour est consacré à un hommage à Pierre Schommer qui en 1939 décida de mettre à l’abri les oeuvres d’art avant que des mains nazies ne s’en emparent. Le dernier jour, toujours entre rêve et réalité, il finit par y retrouver sa défunte bien-aimée…

Si ses réflexions sur les trois peintres français et sur leur influence au Japon sont enrichissantes, l’histoire elle-même paraît bien décousue, sans véritable trame, la Vénus étant le mince fil conducteur entre les paysages de peintres, les histoires à peine ébauchées de gardiens du Louvre, le déménagement de 1939 et l’amour perdu du personnage principal. Un scénario trop mince et décevant pour moi, qui me fait dire que Taniguchi n’a pas vraiment réussi à relever le défi, contrairement à ses prédécesseurs, comme Marc-Antoine Mathieu ou Eric Libergé par exemple.

Les contrées sauvages : tome 1 de Taniguchi

31.12
2014

cop. Casterman

Entre 1975 et 1986, à la fois profondément inspiré par la richesse des décors et des informations contenues dans les cases de la bande dessinée franco-belge, et par la liberté de ton du manga adulte, Jirô Taniguchi crée une nouvelle dynamique de l’image, et partant du récit, à la fois très rapide et très fouillée.

Il rend hommage dans ces huit récits aux grands espaces, aux Indiens d’Amérique décimés, qui surent créer un équilibre respectueux avec leur environnement, et donne souvent sa revanche à la Nature, parfois de façon très cruelle, sur une humanité meurtrière. Une belle réussite. 

TANIGUCHI, Jirô. – Les contrées sauvages : tome 1. – Casterman, 2014. – 216 p. + 14 p. : ill. n.b. + coul. ; 21 cm. – EAN13 9782203084438 : 13,95 €.

Un zoo en hiver ** de Jirô Taniguchi (2009)

10.01
2010

Le jeune Hamaguchi se déplait dans son entreprise de textile à Kyôto : lui qui pensait pouvoir dessiner des modèles se retrouve à s’occuper de la réception des produits commandés aux ateliers de tissage et de la livraison auprès des détaillants. Alors, dès qu’il a du temps libre, il va dessiner les animaux du zoo. Un jour, son patron lui demande d’accompagner sa fille Ayako, qui vient de le couvrir de honte en trompant son mari, dans toutes ses sorties pour la surveiller. Comme il la laisse retrouver son amant, il sent le vent tourner pour lui et en parle à un ami qui le fait engager à Tôkyô comme assistant auprès d’un mangaka…

 

Un zoo en hiver est un récit largement autobiographique. L’histoire n’en est pas moins touchante puisque dans ce récit d’apprentissage, Taniguchi révèle au public ses premiers doutes malgré un talent certain, ses rencontres avec d’autres dessinateurs humbles et attachants, et surtout son premier amour, celui grâce auquel sa vocation va s’accomplir, celui pour une jeune fille à la santé déclinante qui va lui donner des idées et l’inciter à achever son manga. On peut d’ailleurs y voir aussi une certaine forme d’hommage à Mariko. Sans être au niveau de Quartier lointain, qui reste de loin son meilleur manga, celui-ci, plus intimiste, vaut le détour pour mieux comprendre son itinéraire.

A lire dans Carnets de SeL du même auteur :

Le gourmet solitaire *
Un ciel radieux **
Icare **
Terre des rêves *
L’orme du Caucase **
Le journal de mon père **
L’homme qui marche ***
Quartier lointain ***

Casterman, 2009. – 231 p. : ill. n.b.. – (Ecritures). – ISBN 978-2-203-02099-3.

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Un ciel radieux ** de Jirô Taniguchi

31.08
2007

Lors d’un terrible accident de la route, un adolescent et un homme se retrouvent dans le coma. A l’instant-même où Kazuhiro Kubota, le chauffeur de la fourgonnette, la quarantaine, meurt, laissant derrière lui sa femme et sa fille, celui-ci s’éveille au milieu de visages inconnus, dans le corps du jeune motard, Takuya Onodéra…

Les critiques et le public ne semblent pas avoir été tendres avec ce dernier manga de Taniguchi, blasés par cet incipit fantastique paraissant quelque peu peu réchauffé après Quartier lointain. C’est ce qui avait retardé mon achat. Et puis je l’ai lu, et bien m’en a pris. Comme dans Quartier lointain, c’est un homme mûr qui observe de l’intérieur un adolescent choyé par sa famille, sans un sourire ou un mot de gratitude, dans cette attitude caractéristique de la jeunesse à la quête de son indépendance. Le deuil a frappé la sienne, de famille, il sait combien sa mort la laisse démunie. Adolescence, famille, deuil font en effet partie de la thématique de l’auteur, tout comme il fait du travail le frère ennemi de la famille, qui ne survit pas sans lui mais auquel l’homme se sacrifie physiquement ici. Certes, on retrouve tous ces thèmes chers à l’auteur, mais le plaisir à la lecture reste intact, tant ils sont traités avec délicatesse et réalisme. Alors un conseil, lisez-le donc et sortez vos mouchoirs !

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Terre des rêves * de Jirô Taniguchi

11.09
2005

Exceptée la dernière, ces petites histoires mettent toutes en scène nos amies les bêtes : Taniguchi a ici voulu rendre ce profond attachement qui peut souder à jamais les hommes avec leur chien ou leur chat.

Taniguchi semble avoir beaucoup donné de lui-même dans ce manga, nous faisant partager aussi bien sa passion pour les animaux que celle pour l’alpinisme dans les dernières pages. J’avoue, n’ayant pas moi-même de chien ni de chat, avoir beaucoup moins apprécié ce manga que les précédents, même si je concède le fait que ces récits soient particulièrement touchants.