Mots-clefs ‘décroissance’

Diogène et les cyniques ou la liberté dans la vie simple

09.02
2015

 

cop. Le passager clandestin

« Platon le voyant laver ses légumes s’approcha de lui et lui dit tranquillement :

- Si tu te mettais au service de Denys, tu ne laverais pas des légumes.

- Et toi, répondit Diogène tout aussi tranquillement, si tu avais su laver des légumes, tu ne serais pas au service de Denys. »

Figure centrale du cynisme antique, Diogène semble être celui qui a le mieux incarné cette pensée, qui l’a appliquée à son existence-même. Etienne Helmer souligne la radicalité des changements et des renoncements qu’implique le fait de devoir se suffire à soi-même pour accéder au bonheur par une vie simple, vertueuse, d’une frugalité extrême et un retour complet à la nature, en deçà de toutes les conventions et coutumes… quitte à créer le scandale en autorisant l’anthropophagie, l’inceste et le parricide, et en abolissant les rites funéraires. Précurseur de la décroissance, Diogène cherche ainsi à réduire au maximum la distance entre l’appétit et son objet, le besoin et sa satisfaction, et donc la dépendance sociale, créée par le travail et le commerce, pour parvenir à une espèce d’autarcie ou d’autosuffisance libératrice.  

« A cette question « Quelle est la chose la plus belle dans l’homme ? » Il répondit : « La liberté de parole ». »

Proche finalement de la pensée épicurienne, Diogène s’en démarque par son comportement volontairement provocateur, propre à éveiller les consciences, qui, de nos jours, semblerait inimaginable.

 

 

HELMER, Etienne.

Diogène et les cyniques ou la liberté dans la vie simple

Le passager clandestin (Les précurseurs de la décroissance ; 2014)

103 p.

EAN13 9782369350194 : 8 €.

 

Léon Tolstoï contre le fantasme de toute-puissance

12.12
2014

cop. Le passager clandestin

En 1947, George Orwell disait de Tolstoï que comme le Roi Lear, en renonçant au pouvoir, il avait dû faire face à un conflit intérieur tragique : appliquant la loi chrétienne de l’amour, en refusant de faire à autrui ce que l’on ne voudrait pas qu’il nous fût fait et donc de profiter du travail d’autrui, Tolstoï remet en question les promesses des socialistes et la vision classique d’une économie productiviste, utilisant les ressources humaines et naturelles pour servir des objectifs de rendement.

Léon Tolstoï préconise maîtrise de soi et modération, pour revenir aux désirs immodérés fondamentaux : il aborde alors la question du régime alimentaire, voyant le végétarisme comme un premier pas dans la voie du perfectionnement moral.

Il remet en question la vision classique de l’économie, focalisée sur la seule productivité et considérant les humains et la nature comme autant de ressources utilisables à volonté pour servir les objectifs de rendement dans un contexte de rareté.

Il se prononce pour une appropriation des outils et d’une terre à la campagne : il imagine une communauté à la fois technique et naturelle où chaque ouvrier ou artisan disposerait librement de ses outils, utiliserait la terre où il vit et qu’il connaît, qui est brisée par l’appropriation des terres et des moyens de production par les capitalistes.

Selon lui, la campagne préserve l’amour de soi, la juste estimation par l’homme de ses forces, ainsi de ce qui convient à son bien-être, alors que la ville n’est qu’amour-propre, vanité des hommes, confrontation et comparaison.

Il souhaite une alternance des quatre types d’activités humaines sur la journée, soit le travail physique, l’exercice du métier (artisanat), l’activité de l’esprit et de l’imagination, et enfin les relations sociales, pour obtenir les biens matériels et intellectuels y afférant : il n’y aurait alors plus de division du travail !

Il dénonce comme les anarchistes l’impôt comme un vol organisé par l’Etat.

Il se gausse enfin des intellectuels qui croient aux promesses des socialistes selon lesquelles en s’emparant des moyens de production, tous mèneront une vie facile et confortable.

Non content d’avoir écrit des chefs-d’oeuvre et prôné la non-violence à Gandhi avec le résultat que l’on connait, Léon Tolstoï a avancé avant l’heure des idées proches de la décroissance. Des textes qui résonnent encore, à réserver aux plus mûrs.

GARCIA, Renaud. – Léon Tolstoï contre le fantasme de toute-puissance. – Le passager clandestin, 2013. – 94 p.. – (Les précurseurs de la décroissance). – EAN13 9782369350002 : 8 €.

Épicure ou l’économie du bonheur

15.07
2013
cop. Le Passager clandestin

cop. Le Passager clandestin

Reprenant des extraits de la pensée d’Epicure, notamment l’ascèse épicurienne conduisant au bonheur, mais aussi de Lucrèce, de Diogène d’Oenoanda et de Philodème, le philosophe Etienne Helmer nous offre une réflexion sur l’importance du progrès et de la technique, et sur le fonctionnement de l’économie dans une société de décroissance. En effet, il se propose de démontrer les implications socio-économiques de l’éthique épicurienne, qui nous permettrait de revenir à des désirs naturels et nécessaires pour vivre, des besoins physiques et psychiques fondamentaux : et, pour cela, ne pas travailler plus pour gagner plus, mais travailler quatre à cinq heures par jour pour subvenir à nos besoins fondamentaux. Pour contrer notre société de consommation à outrance créée par le capitalisme, Epicure nous indiquerait la question à se poser avant tout achat par exemple :

« A tous les désirs il faut appliquer la question que voici : que m’arrivera-t-il si la chose qui est poursuivie par le désir s’accomplit, et qu’arrivera-t-il si elle ne s’accomplit pas ? » (Epicure, Sentences Vaticanes 71)

Une critique sous-jacente du capitalisme, miroir aux alouettes du bonheur, et une lecture édifiante sur la modernité des grands anciens.

HELMER, Etienne. – Épicure ou l’économie du bonheur. – Le passager clandestin, 2013. -91 p.. – (Les précurseurs de la décroissance). – EAN13 9782916952871 : 8 €.